SOMMAIRE
Haut Moyen Âge partie II
Introduction
Aujourd'hui, nous allons poursuivre notre exploration en plongeant dans le monde de l'agriculture et de l'économie médiévales. Nous allons examiner les modes de production agricole qui sont au cœur de l'économie de l'époque, ainsi que l'importance vitale de l'agriculture dans la société médiévale. Nous allons étudier les dynamiques des échanges commerciaux qui animent les régions médiévales, en mettant en lumière les routes commerciales, les marchés et les foires qui façonnent le paysage économique de l'époque.
En outre, nous allons nous plonger dans la vie quotidienne des paysans qui forment l'essentiel de la population. Nous allons explorer leur habitat rural, des modestes chaumières aux fermes plus imposantes. Nous allons découvrir les tâches agricoles et artisanales qu'ils accomplissent, des travaux des champs à la production de biens artisanaux essentiels à la vie quotidienne. Nous allons également nous intéresser aux festivités et aux rituels qui rythment leur existence, tels que les fêtes religieuses et les célébrations saisonnières.
Ces aspects souvent négligés de l'histoire vont nous permettre de mieux comprendre les réalités concrètes de l'époque et de saisir l'importance de ces acteurs méconnus qui ont façonné le monde médiéval.
IV. L'agriculture et l'économie
A. Les modes de production agricole
Au Haut Moyen Âge, l'agriculture était l'activité économique dominante en France. Les modes de production agricole variaient selon les régions, mais ils étaient généralement basés sur l'exploitation des terres agricoles. Les paysans cultivaient principalement des céréales telles que le blé, le seigle et l'orge, ainsi que des légumes, des fruits et des herbes. Les techniques agricoles utilisaient souvent des outils rudimentaires tels que la charrue en bois et la faucille. Les rendements agricoles étaient modestes, et une grande partie de la production était destinée à l'autoconsommation.
L'agriculture médiévale en France était principalement axée sur la production vivrière et diversifiée. La polyculture était la norme, avec différentes cultures dans une même région pour faire face aux mauvaises récoltes ou aux épidémies, ce qui permettait de varier le régime alimentaire. Les paysans cherchaient à être autosuffisants et à nourrir leur famille, mais ils vendaient également leurs excédents sur les marchés locaux. Certains produits agricoles, comme le vin, étaient même destinés à la commercialisation et à l'exportation.
Les niveaux et la qualité des productions agricoles dépendaient de plusieurs facteurs. Les conditions météorologiques jouaient un rôle crucial, et un été pluvieux et frais pouvait ruiner les récoltes. Les paysans utilisaient des céréales de printemps ou d'autres plantes tardives pour compenser les mauvaises récoltes d'hiver. De plus, les productions agricoles différaient d'une région à l'autre en fonction des caractéristiques naturelles telles que la qualité du sol, le climat et les contraintes imposées par les seigneurs locaux.
L'alimentation au Moyen Âge variait également en fonction de la catégorie sociale et de la période de l'année. Les milieux aristocratiques bénéficiaient de meilleurs pains et consommaient plus de viande que les paysans. Pendant les périodes de jeûne, comme l'Avent et le Carême, la consommation de poisson augmentait. Les crises alimentaires, telles que les famines et les disettes, étaient fréquentes aux XIVe et XVe siècles, mais elles ne peuvent pas être généralisées à l'ensemble du Moyen Âge français.
Les céréales occupaient une place centrale dans l'alimentation médiévale. Le froment était la céréale la plus cultivée et servait à la préparation du pain et des hosties. L'avoine était utilisée pour l'alimentation des chevaux et des porcs. L'orge était utilisée dans la fabrication de la bière et de la cervoise. Le seigle, cultivé en montagne, produisait un pain noir de qualité médiocre. D'autres céréales, comme le millet et le méteil, étaient également cultivées. Les légumineuses, telles que les fèves et les pois, fournissaient une source importante de protéines.
Outre les céréales, d'autres productions agricoles, telles que la vigne, les fruits et les légumes, étaient également importantes. Les vergers et les jardins étaient soigneusement entretenus tout au long de l'année, et le maraîchage était pratiqué à proximité des habitations ou à la périphérie des villes. Les productions agricoles alimentaient également l'artisanat rural, fournissant des matériaux tels que le cuir, la laine et la graisse pour la fabrication d'objets artisanaux.
L'élevage était également crucial pour l'agriculture médiévale. Les bovins, les moutons et les porcs étaient les principales espèces élevées. Les animaux fournissaient de la viande, du lait, du cuir, de la laine et de la graisse, ainsi que de la force de traction pour les travaux agricoles. Les bovins étaient utilisés pour labourer les champs, tirer les chariots et transporter des charges lourdes. Les moutons étaient élevés principalement pour leur laine, qui était utilisée pour la fabrication de vêtements, de tapisseries et d'autres textiles. Les porcs étaient élevés pour leur viande et leur graisse, et ils jouaient également un rôle important dans la gestion des déchets alimentaires en les transformant en engrais naturel.
La gestion des terres agricoles reposait sur le système des terroirs, qui consistait en de vastes zones de terres agricoles partagées entre les paysans d'une communauté. Chaque famille avait droit à une parcelle de terre qu'elle cultivait pour subvenir à ses besoins, tandis que d'autres terres étaient utilisées en commun pour le pâturage des animaux ou la culture de céréales et de légumes destinés à la communauté.
Les techniques agricoles utilisées au Moyen Âge étaient basées sur des connaissances traditionnelles transmises de génération en génération. Les paysans utilisaient des outils tels que la charrue en bois, la faux, la pelle et le fléau pour travailler la terre, récolter les cultures et battre le grain. Ils utilisaient également des techniques de rotation des cultures pour maintenir la fertilité des sols. Par exemple, certaines terres étaient laissées en jachère pendant une période afin de permettre leur régénération.
L'eau était un élément essentiel pour l'agriculture, et les paysans utilisaient des systèmes d'irrigation tels que les canaux, les étangs et les norias pour fournir de l'eau aux cultures. Les moulins à eau étaient également utilisés pour moudre les céréales et produire de la farine.
En résumé, l'agriculture médiévale en France était centrée sur la production vivrière et diversifiée, avec une polyculture, l'élevage d'animaux tels que les bovins, les moutons et les porcs, et l'utilisation de techniques agricoles traditionnelles. Les céréales, les légumineuses, les fruits et les légumes étaient cultivés, et les animaux fournissaient de la viande, du lait, du cuir, de la laine et de la graisse. L'agriculture médiévale était fortement influencée par les conditions météorologiques, les caractéristiques naturelles des régions et les contraintes imposées par les seigneurs locaux.
B. L'importance de l'agriculture dans l'économie
Au Haut Moyen Âge, l'agriculture était indéniablement le secteur économique le plus crucial. Bien que peu de progrès aient été réalisés au début de la période, à l'exception notable de la multiplication des moulins à eau, l'agriculture était le fondement de la société médiévale.
Les principales cultures agricoles étaient les céréales, parmi lesquelles figuraient le froment, le seigle, le mil, l'avoine et l'orge. Le vin était également produit en quantité considérable, bien que sa qualité ne soit souvent pas optimale. Il revêtait une importance particulière en tant qu'élément essentiel de la liturgie chrétienne. Cependant, la forêt était également une ressource majeure pour les populations médiévales. Son défrichement et son entretien fournissaient du bois pour la construction, la menuiserie et le chauffage, tandis que ses produits alimentaires, tels que le miel, les baies, les champignons et le braconnage, constituaient des sources de nourriture complémentaires, surtout en période de disette.
Vers l'an mil, le système agricole subit une crise et la croissance démographique de l'époque engendre une révolution agricole. Un nouveau système émerge, reposant principalement sur l'utilisation de la charrue, notamment dans le nord de l'Europe, ce qui permet le labour en profondeur des sols, contrairement à l'araire utilisé auparavant. L'assolement triennal fait également son apparition à cette période. Il s'agit de diviser une parcelle de terre en trois parties, chacune étant consacrée à une culture spécifique qui est alternée chaque année. De plus, l'utilisation du cheval comme animal de trait accélère les travaux agricoles. Autour de l'an 1000, d'importants travaux agricoles sont entrepris, notamment le défrichement des forêts et le drainage des zones marécageuses.
Cependant, à la fin du Moyen Âge, l'Europe est touchée par une dépression économique consécutive à la crise des récoltes de 1315-1317, à la guerre de Cent Ans et à la Peste noire de 1348-1353. De nombreux témoignages attestent de la ruine des campagnes, de la dépopulation et de l'abandon des terres. Cette misère conduit à la plus grande révolte paysanne du Moyen Âge, connue sous le nom de Jacquerie.
L'agriculture jouait donc un rôle primordial dans l'économie médiévale, fournissant les moyens de subsistance de la population et étant au cœur des activités quotidiennes. Les cultures céréalières, le défrichement des terres, l'utilisation de la charrue et l'organisation de l'assolement triennal témoignent des avancées agricoles significatives de cette période, tout en soulignant les défis auxquels les paysans étaient confrontés lors des crises économiques et démographiques.
C. Les échanges commerciaux
Au Moyen Âge, les échanges commerciaux en Europe de l'Ouest connaissent des fluctuations. Après la chute de l'Empire romain d'Occident, le commerce diminue en raison de divers obstacles. Les routes et les ponts sont mal entretenus, ce qui ralentit les déplacements, et le banditisme est courant. De plus, les seigneurs locaux imposent des péages sur les marchandises transportées, entravant ainsi les échanges commerciaux.
Cependant, malgré ces difficultés, le commerce local persiste. Les habitants des campagnes vendent les produits de leurs champs sur les marchés, tandis que les artisans des villes échangent avec eux les objets qu'ils ont fabriqués. Entre les XIe et XIIIe siècles, la paix et l'ordre sont rétablis, favorisant ainsi l'expansion des villes et la prospérité du commerce et des foires. De nouvelles routes sont ouvertes, notamment à travers les Alpes, facilitant les échanges commerciaux à travers toute l'Europe.
Le commerce se développe également à travers la Méditerranée, en partie grâce aux pèlerinages et aux croisades. Les villes de Venise et de Gênes établissent des comptoirs dans les ports de la Méditerranée orientale et de la mer Noire, tandis que Marseille et Barcelone font de même. Les marchands européens se rendent à Alexandrie, à Trébizonde ou en Syrie pour se procurer des produits de l'Orient et de l'Extrême-Orient tels que les soieries, les épices et les pierres précieuses. En retour, ils fournissent aux marchands orientaux des draps en provenance de Flandre, des armes, du bois et du vin. Les échanges avec l'Afrique se font par le biais des marchands arabes et berbères, permettant notamment d'importer de l'or en Europe, une ressource essentielle.
À partir de l'an mille, les techniques agricoles se modernisent et les terres cultivées s'étendent grâce aux grands défrichements. Cela entraîne une augmentation de la production céréalière, qui constitue la base de l'alimentation des paysans. Au XIVe siècle, les paysans récoltent près de deux fois plus de grains de blé qu'il y a 300 ans, créant ainsi un surplus de production. Les fermiers se rendent alors sur les marchés hebdomadaires des villes les plus proches pour échanger leur excédent contre du sel ou des produits artisanaux tels que des tissus, des ustensiles ou des outils. Ainsi, un premier réseau d'échanges se développe, et certaines villes organisent également des foires pour favoriser le commerce.
Pour faciliter ces échanges, les seigneurs accordent certaines libertés aux villes, notamment le droit de faire du commerce et de tenir des marchés. Ces activités sont réglementées par des chartes de franchise, des actes officiels qui définissent les droits et les obligations des commerçants.
En ce qui concerne les modes de transport, après la chute de l'Empire romain, les routes ne sont plus entretenues et certaines parties sont même démantelées. Cela entraîne une lenteur considérable, avec une vitesse de déplacement d'environ 10 à 15 km par jour. Au XIIe siècle, de nouvelles voies de communication commencent à se former, mais ce n'est qu'au XIVe siècle que le réseau routier s'améliore réellement. Toutefois, les nouvelles routes restent des chemins caillouteux. Pour le transport de charges lourdes, le transport fluvial ou maritime reste privilégié.
Ainsi, malgré les obstacles et les difficultés rencontrés, les échanges commerciaux ont joué un rôle important dans l'économie du Haut Moyen Âge, tant au niveau local que dans les échanges internationaux. Ces échanges ont contribué à la prospérité des villes, à l'enrichissement des marchands et à l'expansion des horizons économiques des sociétés médiévales.
V. La vie quotidienne des paysans
La vie quotidienne des paysans au Moyen Âge était marquée par un travail pénible six jours sur sept. Du lever au coucher du soleil, les paysans s'adonnaient aux tâches agricoles et artisanales. Leur vie était rythmée par le soleil et le son des cloches qui indiquaient les heures. Les paysans consacraient la majeure partie de leur temps aux travaux des champs, ne prenant un jour de repos que le dimanche pour assister à la messe.
Les saisons et le calendrier agricole dictaient le rythme de leur travail. Ils devaient défricher la terre, la labourer, semer les cultures et prendre soin des animaux. Cependant, leurs outils étaient rudimentaires et limités par rapport à ceux dont nous disposons aujourd'hui. Au fil du temps, quelques innovations ont émergé, comme l'introduction progressive de la charrue qui a remplacé l'araire et s'est répandue en Europe du Xe au XIIIe siècle.
Les conditions de vie des paysans étaient extrêmement difficiles. La plupart d'entre eux vivaient dans des maisons modestes construites en pierre ou en torchis, recouvertes d'un toit de chaume. Ces habitations étaient généralement situées dans des villages près du château du seigneur. Les maisons n'avaient qu'une seule pièce, souvent mal éclairée et mal isolée, avec un sol en terre battue. La nourriture était limitée et peu variée, principalement composée de pain, de bouillies, de soupes, de céréales et de légumineuses. Les périodes de disette et de famine étaient fréquentes et les épidémies, comme la peste et le choléra, représentaient un danger constant. Les paysans devaient également faire face aux difficultés liées au brigandage et aux guerres, ce qui réduisait leur espérance de vie à environ 40 ans.
Malgré ces conditions difficiles, la solidarité communautaire était importante. Les paysans se soutenaient mutuellement, travaillaient en équipe lors des périodes de récolte et partageaient les ressources disponibles. Les femmes jouaient un rôle essentiel dans les travaux agricoles et l'élevage des animaux. Les enfants étaient également impliqués dans les tâches dès leur plus jeune âge, contribuant ainsi aux travaux de la ferme.
La religion occupait une place centrale dans la vie des paysans. Ils étaient profondément croyants et participaient activement aux pratiques religieuses de l'Église. Les églises et les chapelles étaient des lieux importants de rassemblement et de prière pour les paysans, et les célébrations religieuses rythmaient leur calendrier.
En résumé, la vie quotidienne des paysans au Moyen Âge était marquée par un travail acharné, des conditions de vie difficiles et une précarité constante. Malgré cela, ils faisaient preuve de résilience, de solidarité et de foi pour surmonter les obstacles et assurer leur subsistance.
A. L'habitat rural
Au cours du Moyen Âge, la vie quotidienne des paysans était étroitement liée à leur occupation, à leurs habitats et à leurs logements. La population rurale était majoritaire, avec plus de 90% des habitants vivant dans les campagnes.
L'occupation des campagnes était dense dès le début du Moyen Âge, avec la présence de fermes isolées et de petits hameaux. Cependant, c'est au XIIe siècle que l'on observe un véritable essor urbain. Les premières mottes, des élévations de terre entourées de fossés, et les châteaux que nous connaissons aujourd'hui apparaissent quant à eux au XIIIe siècle.
Les fouilles préventives menées depuis les années 1990 ont permis de découvrir de nombreux habitats ruraux, mettant en évidence la densité de l'occupation des campagnes. On trouve des fermes isolées ou regroupées en hameaux entre le Ve et le Xe siècle, ainsi que des villages plus structurés à partir du XIe siècle. Certains de ces villages possèdent déjà une église et un habitat d'élite dès les VIIe et VIIIe siècles. Les villes commencent également à se développer, mais ce n'est qu'au XIIe siècle que l'essor urbain se manifeste réellement.
L'habitat rural du premier Moyen Âge se compose d'une ou plusieurs unités agricoles ou fermes. Les bâtiments principaux, construits sur des poteaux plantés, sont entourés de diverses annexes telles que des ateliers, des granges, des écuries et des aires de stockage. Les murs sont en terre (torchis) et en bois, avec des toits en chaume. Des petits bâtiments semi-enterrés remplissent différentes fonctions, comme des annexes domestiques, des ateliers de tissage, des remises ou des abris pour les animaux. Les structures de stockage des denrées alimentaires, telles que les fours, les puits, les greniers et les silos enterrés, sont souvent réutilisées comme dépotoirs.
À partir des VIIIe et IXe siècles, on observe des modifications dans l'organisation de l'habitat. Des zones à vocation spécifique sont aménagées pour regrouper certaines tâches, comme le traitement des céréales ou la cuisson. Les bâtiments et les silos deviennent plus grands, tout comme les parcelles, et il y a une volonté croissante de partager certaines activités. Les constructions en pierre, symboles d'un statut privilégié, se multiplient au cours du Moyen Âge. L'habitat se regroupe progressivement en hameaux ou villages, bien que les fermes isolées persistent.
B. Les tâches agricoles et le temps de travail au Moyen Âge
Au Moyen Âge, les paysans étaient principalement occupés par les activités agricoles. On pouvait distinguer deux catégories de paysans : les serfs, qui étaient liés au seigneur et n'avaient pas la pleine liberté de mouvement, et les vilains, qui étaient des paysans libres travaillant sur les terres d'un seigneur en tant que locataires.
Les paysans avaient des obligations envers leur seigneur, notamment des corvées qui étaient des tâches non rémunérées. Ils devaient s'occuper de l'entretien des routes, de la construction de bâtiments et parfois même fournir des services militaires. Ces corvées limitaient leur disponibilité et leurs ressources pour leurs propres activités agricoles.
Les paysans étaient également soumis à des pratiques communautaires, telles que le glanage. Le glanage consistait à récupérer les restes des récoltes après que les seigneurs et les paysans plus aisés aient prélevé leur part. C'était une manière pour les paysans les plus démunis d'obtenir de la nourriture supplémentaire pour leur famille.
La seigneurie représentait l'espace économique exploité pour le compte du seigneur. Elle était divisée en deux parties distinctes : la réserve, où se trouvait généralement le château du seigneur, et les tenures, qui étaient les terres accordées aux paysans en échange de redevances en nature ou en argent.
En ce qui concerne le temps de travail, il était réglementé par les statuts de chaque corporation et tenait compte des pratiques et de l'équité. Pour la plupart des métiers, la journée de travail commençait généralement au lever du jour et se terminait au coucher du soleil, avec des variations en fonction des saisons. Cette limitation de la durée du travail visait à éviter la fatigue des ouvriers et la baisse de la qualité de la production due à un manque de lumière. Le travail à la chandelle était souvent interdit pour des raisons de sécurité contre les incendies.
En janvier, ils curaient les fossés à la houe.
En février, ils étalaient le fumier sur les terres avec bêche et houe.
En mars, ils taillaient les vignes à la serpe.
En avril, ils tondaient les moutons aux ciseaux (appelés forces).
En mai, le seigneur chassait au faucon. Les paysans, quant à eux, attendaient le moment de la récolte...
En juin, ils fauchaient l'herbe à la faux.
En juillet, ils moissonnaient à la faucille.
En août, ils battaient le blé au fléau sur l'aire du village..
En septembre, ils semaient à la volée.
En octobre, ils pressaient le raisin aux pieds dans une cuve.
En novembre, ils cueillaient les glands pour les cochons.
En décembre, ils tuaient les cochons.
Il est important de souligner que le calendrier comprenait de nombreux jours de repos et de célébration des fêtes religieuses, ce qui entraînait des périodes de chômage. Outre les dimanches, il y avait environ 27 jours fériés obligatoires liés aux fêtes religieuses tout au long de l'année. De plus, il existait d'autres jours de congé collectifs ou individuels liés aux confréries, aux saints patrons de la paroisse et aux maîtres eux-mêmes. Globalement, le travail était suspendu pendant environ 80 à 85 jours chaque année.
En résumé, les paysans au Moyen Âge étaient engagés dans des tâches agricoles qui incluaient des corvées envers les seigneurs et des pratiques communautaires telles que le glanage. Leur temps de travail était réglementé par les corporations, avec des journées commençant au lever du jour et se terminant au coucher du soleil. De plus, de nombreux jours de repos étaient observés pour célébrer des fêtes religieuses, ce qui réduisait davantage le nombre de jours de travail effectif dans l'année.
C. Les tâches artisanales et le système corporatif au Moyen Âge
Au Moyen Âge, la société était structurée en trois ordres : les labores (ceux qui travaillent, comprenant les paysans, les marchands et les artisans), les bellatores (les hommes d'armes tels que les seigneurs et les chevaliers) et les oratores (les hommes d'église dédiés à la prière). Le travail était considéré comme une conséquence du péché originel et perçu comme une forme de châtiment ou de pénitence.
Cependant, à partir du Xe siècle, la société médiévale a connu des changements significatifs. La reprise économique, après une période d'instabilité due aux invasions barbares, a favorisé le développement du commerce et des métiers artisanaux. Les villes ont été le berceau de la renaissance et de la diversification des métiers artisanaux.
Les artisans et les marchands, qui faisaient auparavant partie de l'ordre des labores, ont acquis un pouvoir politique croissant dans la société. Ils se sont organisés en associations appelées corporations, qui avaient pour but de réglementer et de protéger les intérêts des artisans d'une même profession. Les corporations détenaient un monopole sur leur métier et bénéficiaient d'une autonomie administrative.
Les métiers spécialisés étaient organisés au sein des corporations. Chaque corporation était dirigée par des jurés chargés de faire respecter les règlements internes. Les métiers étaient hiérarchisés, avec des apprentis, des compagnons et des maîtres.
L'apprentissage débutait généralement vers l'âge de 12 ans et durait environ trois ans. Pendant cette période, l'apprenti vivait chez son maître, qui le logeait et le nourrissait, mais il ne recevait pas de salaire. Une fois son apprentissage terminé, l'apprenti devenait compagnon, recevait un salaire et continuait à perfectionner ses compétences. Pour accéder au statut de maître, un compagnon devait présenter un chef-d'œuvre et payer des frais d'admission élevés. Le maître avait son propre atelier, ses propres outils et avait le droit de former des apprentis et de diriger la corporation.
Les corporations avaient pour rôle de réglementer les conditions de travail, la fabrication des produits, de prêter assistance et de contrôler la production. Elles fixaient minutieusement les salaires, les prix, les heures de travail et infligeaient des sanctions en cas de non-respect des règles. Les règlements étaient stricts, limitant par exemple le nombre d'ateliers et d'ouvriers qu'un maître pouvait employer.
Les corporations étaient également des institutions qui assuraient la protection sociale des artisans. Elles disposaient de locaux de réunion, d'une caisse d'assistance commune, de règlements et d'une chapelle. Chaque corporation avait sa propre bannière, son sceau et un saint patron. En 1368, le Livre des métiers, rédigé par Étienne Boileau sur demande du roi de France, codifiait les coutumes et pratiques des corporations parisiennes.
Il convient de noter que tous les travailleurs n'appartenaient pas aux corporations. Certains métiers considérés comme "vils" étaient exclus du système corporatif, tels que les meuniers, les aubergistes, les légumiers, les charretiers, les bateliers, les porteurs et les hommes de peine. Les travailleurs peu qualifiés, appelés "ouvriers" ou "manœuvres", n'appartenaient à aucun métier spécifique et étaient embauchés à la journée sur la place d'embauche, comme la célèbre place de Grève à Paris.
D. Les fêtes et les rituels
Au Haut Moyen Âge, la vie quotidienne des paysans était marquée par de nombreuses fêtes populaires et religieuses. Étant donné que la société était principalement rurale, il était important pour les gens de s'adapter aux saisons et aux travaux des champs. Les rites chrétiens se mélangeaient alors avec les traditions du peuple, englobant des jeux et ripailles variés dans les villes et les régions profondes de la France médiévale.
À cette époque, le découpage du temps était basé sur l'heure solaire, ce qui signifie que les mois et les jours avaient une durée variable en fonction des saisons. Les journées plus longues en été impliquaient une quantité de travail plus importante. Au Moyen Âge, le temps n'était pas mesuré en heures, mais en prières, qui rythmaient la vie quotidienne :
Matines :
première partie de l'office divin, récitée à l'aube ou même au milieu de la nuit.
Laudes :
seconde des heures canoniales, composée de psaumes et de cantiques en l'honneur de Dieu.
Primes :
première heure de l'office du jour, récitée au lever du jour vers six heures du matin.
Tierces :
heure canoniale récitée vers neuf heures du matin, entre prime et sexte.
Sextes (midi) :
heure canoniale récitée vers midi, entre tierce et none.
Nones :
heure canoniale récitée à la neuvième heure du jour, après sexte.
Vêpres :
partie de l'office divin située entre nones et complies, célébrée dans l'après-midi ou le soir.
Complies :
heure canoniale marquant la fin de l'office divin, après les vêpres.
Les métiers de l'époque commençaient leur travail dès le lever du soleil, souvent annoncé par le son d'une corne indiquant la fin du guet de nuit. La fin de la journée de travail variait en fonction des métiers et était généralement annoncée par la cloche de l'église du village, qui sonnait pour annoncer les "complies".
Il était interdit de travailler les dimanches et les jours de fêtes religieuses, ce qui représentait environ 27 fêtes par an, en plus des jours de repos individuels ou collectifs. En tout, cela représentait une interruption du travail entre 80 et 85 jours par an.
Parmi les fêtes religieuses importantes, on compte l'Ascension, la Pentecôte, Noël, ainsi que les fêtes des saints tels que Sainte Geneviève, l'Épiphanie, la Purification de la Sainte Vierge, l'Annonciation, et bien d'autres. Les fêtes religieuses étaient célébrées avec différentes coutumes selon les régions. Par exemple, à Noël, les chaumières étaient décorées de houx et de branchages, tandis que dans le Nord, des combats de coqs étaient organisés. Le jour de l'Épiphanie, les paysans tiraient la fève pour savoir qui serait le roi, et c'était également l'occasion de payer ses taxes.
Le Carême était une période de jeûne, de partage et de prière de quarante jours.
Conclusion
En conclusion, dans cette seconde partie de notre série sur la vie quotidienne au Haut Moyen Âge, nous avons exploré l'agriculture et l'économie médiévales. Nous avons constaté que l'agriculture constituait le pilier central de l'économie de l'époque, et nous avons étudié les modes de production agricole ainsi que l'importance de cette activité dans la société médiévale. Les échanges commerciaux ont également joué un rôle vital, avec l'existence de routes commerciales, de marchés et de foires qui animaient les régions médiévales.
En parallèle, nous avons plongé dans la vie quotidienne des paysans, qui représentaient la majeure partie de la population. Nous avons découvert différents types d'habitats ruraux, allant des modestes chaumières aux fermes plus imposantes. Nous avons également exploré les tâches agricoles et artisanales qu'ils effectuaient, ainsi que les festivités et rituels qui marquaient leur existence.
La semaine prochaine, dans la troisième partie de notre série sur le Haut Moyen Âge, nous aborderons les sujets suivants :
VI. La vie quotidienne des seigneurs
A. Les châteaux et leur organisation
B. Les activités des seigneurs
C. Le rôle des femmes et des enfants
VII. La vie quotidienne des moines et des moniales
A. Les monastères et les abbayes
B. La vie religieuse et spirituelle
C. L'impact des ordres monastiques sur la société
Nous poursuivrons ainsi notre exploration fascinante de la vie quotidienne à travers différentes strates de la société médiévale, en examinant les aspects spécifiques des seigneurs et des religieux. Restez avec nous pour en apprendre davantage sur cette période captivante de l'histoire.
SOURCES
IV. L'agriculture et l'économie :
A. Les modes de production agricole :
"Capitulaire de Villis - Charlemagne":
Ce texte de l'époque carolingienne énumère les différents domaines royaux et donne des détails sur les pratiques agricoles.
B. L'importance de l'agriculture dans l'économie :
"Chronique de Saint-Pierre-le-Vif de Sens" - Abbaye de Saint-Pierre-le-Vif de Sens : Ce document médiéval relate les activités économiques de l'abbaye, y compris les pratiques agricoles.
C. Les échanges commerciaux :
"Charte de Foire de Champagne" - Thibaut IV de Champagne :
Cette charte médiévale réglemente les échanges commerciaux lors des foires de Champagne, qui étaient parmi les plus importantes de l'époque.
V. La vie quotidienne des paysans :
A. L'habitat rural :
"Le Livre des manières" - Étienne de Fougères : Ce texte du XIIIe siècle décrit la vie quotidienne des paysans, y compris leur habitat et leurs conditions de vie.
B. Les tâches agricoles et artisanales :
"Le Ménagier de Paris" - anonyme : Ce manuel de ménage du XIVe siècle donne des conseils pratiques sur les activités agricoles et artisanales des paysans.
C. Les fêtes et les rituels :
"Le Livre des fais et bonnes meurs du sage roy Charles V" - Christine de Pizan : Ce livre du XIVe siècle décrit les fêtes et les rituels de la cour royale, qui étaient souvent imités par la noblesse et les paysans.
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